Chaque mois, je parle plus en détail sur un arbre que j’ai rencontré.
Le châtaignier de la Nalière
« Gland de Zeus ». C’est ainsi que les grecs anciens nommaient la châtaigne.
Autour de la Méditerranée, on surnommait le châtaignier « arbre à pain ». Et on moulait ses fruits pour faire de la farine.
Le châtaignier a permis à des populations entières de survivre en temps de disettes.
Les abeilles l’apprécient particulièrement et en font un miel au goût bien marqué.
Le plus vieux châtaignier du canton de Neuchâtel « habite » à La Nalière, sur la commune de St-Aubin-Sauge.
On dit qu’il a probablement été offert en cadeau à l’occasion de la construction de la première ferme de la Nalière, autour de 1604, qui elle-même aurait été une dépendance du château de Gorgier.
A plus de 400 ans, il en a dû en voir des changements de propriétaires ou de fermiers.
Il a dû en entendre des vaches avec leurs sonnettes pâturer sous ses branches.
Il pourrait nous parler longuement de la progression des modes de culture sur la ferme.
Pour l’agriculteur des lieux, ce châtaignier est l’emblème de la ferme et il protègerait la ferme de la foudre. En effet, la foudre a souvent frappé l’arbre, parfois très violement et a toujours épargné les bâtiments de ferme. Pourvu que ça dure !
« C’est notre châtaignier et on y tient. On aime manger ses fruits. On fait de la brisolée ».
Platane des près d'Areuse
Fleurs et fruits
Platane des près d’Areuse
Un platane de 200 à 250 ans habite aux Prés d’Areuse. Il a été planté entre la fin du 18ème et le début du 19ème siècle, lors de la construction de la ferme, dépendance d’une maison de maitre toute proche.
Le nom de Platane est du nom grec plátano qui veut dire large. Chez les anciens, autour de la Méditerranée, le platane était consacré aux génies. C’est l’arbre le plus vanté dans la mythologie après le cèdre.
Selon Pline, il fut apporté de l’Asie et servi même d’ornement au tombeau de Diomède. Pline dit encore qu’il y en avait un qui avait été planté de la main d’Agamemnon lui-même.
Les Grecs avaient la plus grande vénération pour cet arbre. Les Romains le faisaient même parfois arroser avec du vin.
Pour le paysan qui cultive actuellement la ferme des Près d’Areuse, ce platane, c’est le cœur de la ferme et il représente la force tranquille.
Le platane des Près d’Areuse trône au milieu de la cour de la ferme et étale loin ses larges branches. Son tronc fait plus de six mètres de circonférence. Il procure une ombre agréable et bienfaisante en été. Autrefois, en cas de risque d’orage, on mettait les chars de récoltes à l’abri de la pluie sous son large feuillage, le temps de tout rentrer avant que les nuages ne se percent.
Il sert d’ailleurs aujourd’hui encore de « pluviomètre » : » tant que ça reste sec sous le platane, il a plu moins de 4 mm ; à 6 mm, quelques parties sont mouillées et quand tout est mouillé sous sa ramure, c’est qu’il a « fait » plus de 8 mm !«
Platane des près d'Areuse
Akènes (fruits) et bourgeon
Les Platanes d’Entreroches
Le canal d’Entreroches devait faire partie d’un ensemble de canaux permettant de relier par voies navigables la mer du Nord à la mer Méditerranée par le Plateau suisse. Il traverse le Mormont entre Orny et Cossonay. En 1640, le premier tronçon, entre Yverdon et Orny est terminé. Huit écluses régulent ce bief de 17 km, récupérant une différence de niveau de 16 mètres, mais le canal n’ira jamais plus loin que Cossonay. Il est exploité alors pour le transport de marchandises entre Yverdon et Entreroches. En 1829, un orage détruit un pont aqueduc et obstrue le canal, provoquant la fin de son exploitation.
Deux platanes portent encore les traces des anneaux où on attachait les barges de transport. Ces platanes ont continué de pousser en prenant des formes très particulières, engloutissant les supports de ses larges branches, mais surtout les anneaux, maintenant invisibles de l’extérieur. La pointe de fixation de l’anneau pend librement à l’intérieur du tronc qui s’est évidé en vieillissant, alors que l’anneau lui-même reste encore englouti dans le tronc.
Début avril 2025, un camion casse une branche d’un des platanes lors d’une manœuvre.
Le propriétaire a tronçonné la branche abîmée et l’on peut voir que la branche a vécu longtemps avec très peu de bois. Elle repartira assure-t ’il.
Le chêne de Perreux
Les chênes sont réputés vivre vieux !
Panoramix est par contre trop ancien pour avoir cueilli du gui sur le vénérable « Cassanus » de Perreux, dans les forêts de Boudry, malgré que ce chêne avait un âge plus que vénérable.
Il était donné comme le plus vieux chêne de Suisse en 1979, quand il a été abattu.
Ce Chêne est né au début de la réforme, environ 30 ans avant la restauration de la Tour Marfaux de Boudry où on installa une horloge en 1548. Si son horloge fonctionnait encore, sa petite aiguille aurait fait environ 157’000 tours de cadran au moment de l’abattage du chêne.
Le Chêne de Perreux, lui, a vu plus de 169’000 fois le jour se lever avant d’être transformé en bois d’œuvre.
45 ans après son abattage, la souche et les 5 mètres inférieurs de la bille (non utilisables car le cœur était atteint de pouriture) sont partiellement décomposées, mais encore bien visibles dans la forêt au-dessus de Perreux, pas loin de la Fontaine des Crapauds.
« Cassanus » est le nom gaulois du chêne
Le Tilleul de Longeaigues
Le tilleul de Longeaigue se situe sur la route entre Butte et Sainte-Croix. Il est né il y a environ 200 ans pousse au bord de la rivière « Le Buttes ». Dans la région, on l’appelle également le « Charpentier de Longeaigue » à cause de ses énormes charpentières.
Le tilleul est associé à des divinités féminines ou à des femmes de légende. Chez les Vikings, par exemple, le tilleul était dédié à Frigga, l’épouse d’Odin, déesse de l’amour maternel, de la fécondité mais aussi du passage entre la vie et la mort. En Europe, il est parfois appelé « Arbre de Vénus ».
Les fleurs de tilleul sont utilisées pour leurs vertus gustatives et médicinales et les abeilles raffolent tant de ses fleurs que du miellat qu’elles recueillent sur ses feuilles en cœur. Son écorce solide était utilisée pour fabriquer des cordes. Au moyen âge, son bois tendre et blanc a ainsi servi à sculpter tant de saints qu’il a fini par être considéré comme bois sacré.
Le tilleul pousse vite et offre un ombrage agréable. La plupart on été planté en campagne, mais surtout dans les villes et villages où ils sont souvent un point de ralliement. Autrefois on réglait les problèmes de litige sous ses branches.
Le saule à feuilles de serpolet de la Dt de Morcles
Loin du saule pleureur, quelques saules se sont adaptés à la vie dans des conditions extrêmes. Ce sont des saules tapissant très petits. Ils ne se dressent pas fièrement dans les paysages et le randonneur à peine à croire qu’il marche dans une forêt de saules…
Le saule arctique est le plus petit d’entre eux et se rencontre autour de l’Océan arctique, Il mesure quelques cm et peut vivre 200 ans.
Le saule herbacé, le plus petit arbre d’Europe pousse dans les montagnes suisses et « atteint » les 4 à 10 cm de haut.
Le saule à feuilles de serpolet est un peu plus grand. Normalement il devrait ramper comme ses confrères, mais celui-ci a rencontré un petit rocher et se dresse comme un grand et fait le fier du haut de ces 12 cm.
Il habite 100 mètres en dessous de la Dent de Morcles.
Arbre ou sous-arbrisseau ?
S’ils sont si petits ces saules, peut-on les appeler « arbre » ?
Selon les définitions, un arbre est un végétal de haute taille, de longue longévité, dont le tronc se dresse droit, ses ramifications se développant en houppier à au moins 5 m de haut. L’arbre s’ancre dans le sol par ses racines, et pour soutenir sa structure est capable de fabriquer du vrai bois.
A part la hauteur, les saules tapissants répondent à tous ces critères.
Alors je continue à les appeler des arbres…